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lundi 25 avril 2011

POUVOIR... DE BEN BELLA A BOUTEFLIKA IV

 N'ayant de comptes à rendre qu'à ma conscience puisque je ne dépends d'aucune chapelle (ardente), je reprends "sans peur et sans reproches" ce texte datant de 2011...




Les commentateurs qui oublient le texte pour décortiquer les motivations, les pulsions, les orientations et l'obédience de l'auteur, c'est une mode du débat algérien, ne seront pas supprimés (ni leurs allégations), ce n'est pas dans mes habitudes... mais ils ne recevront qu'un éclat de rire en guise de commentaire à leurs commentaires...
POUVOIR... DE BEN BELLA A BOUTEFLIKA IV
(c'est long mais ça se laisse lire)
La question: "le pouvoir algérien mérite t il le soutien, l'indifférence, l'indulgence ou le mépris" exige absolument qu'on s'y attarde et qu'on y réponde... Mais pour comprendre ce "pouvoir", il faut remonter à sa genèse...
Il y a un certain nombre de petites vérités qu'il est indispensable de se mettre en tête pour pouvoir en discuter sans verser dans une analyse préalablement faussée.
Et d'abord cette évidence: L'Algérie n'est ni la France, ni le Maroc, ni la Lybie, ni la Tunisie. L'Algérie est un cas unique. C'est un pays qui a subi une colonisation de peuplement et dont la décolonisation s'est faite avec une rare brutalité.
La guerre a été menée sous la bannière du FLN, un mouvement de libération qui avait pour programme essentiel et presque exclusif: LA LIBERATION DU PAYS ; le « Congrès de la Soummam » et ses lignes directrices n’étant qu’un avatar des luttes d’influence au sein de ce mouvement, n’en déplaise à ceux qui veulent en sacraliser l’esprit…
Pour y arriver, le FLN a du réduire toutes les velléités et les ambitions politiques (parfois fondamentalement divergentes) qui divisaient les Algériens: Ulémas, communistes, messalistes, arabistes, berbéristes, assimilationnistes...
La mise au pas de ces tendances ne pouvait se faire avec un gant de velours et ça se comprend ! Et si les différentes tendances ont accepté de se fondre dans le creuset du FLN, elles n'ont pas pour autant renié leurs principes ni pardonné cette mise au pas.
A l'indépendance, deux choix se présentaient:
a)- libérer les tendances et leur permettre d'activer, chacune selon ses conceptions.
b)- continuer à monopoliser le pouvoir en matant les crâneurs qui font preuve de résistance et en instrumentant les dociles qui font acte de soumission.
La première alternative ne pouvait être envisagée, sachant que le pays était d'une part extrêmement fragile et que d'autre part, la guerre froide battait son plein et faisait courir le risque d'une guerre civile dévastatrice sous les influences et les exhortations des deux blocs (souvenez-vous de ces "dons du peuple des Etats Unis d'Amérique à ne pas vendre ou échanger" et des clins d'œil paternalistes des camarades soviétiques...).
Et c'est la deuxième option qui fut choisie. La première Constitution a le mérite d'expliquer sans ambages cette option puisque dans son préambule elle dit textuellement:
" Les régimes présidentiels et parlementaires classiques ne peuvent garantir (la) stabilité alors qu'un régime basé sur la prééminence du peuple souverain et du parti unique, peut l'assurer efficacement."
Le pouvoir de l'époque fut aussi très clair dans ses choix puisque:
Le 14/8/63, le décret 63/297 fut promulgué; tous les ministres et Ben Bella signèrent l'interdiction " sur l'ensemble du territoire national les associations ou groupements de fait ayant un caractère politique."
Et comme conséquence logique de ce décret,
Le 28/9/63 est prononcée la dissolution du FFS "considérant qu'il poursuit un but politique, que son activité est de nature à porter atteinte à l'intégrité du territoire et à l'unité nationale."
Et pour clore le chapitre,
Le 3/10/63 dans un message à la nation lu à l'assemblée nationale, Ben Bella annonce: «conformément au vœu du peuple et du FLN, je mets en œuvre cet article 59 de la Constitution. A partir du moment présent j'assume les pleins pouvoirs comme j'en ai reçu la mission et comme j'en ai fait le serment afin de maintenir la RADP dans la voie que vous lui avez tracée..."
L'article 59 en question stipule:
"En cas de péril imminent, le Président de la République peut prendre des mesures exceptionnelles en vue de sauvegarder l'indépendance de la nation et les institutions de la République..."
La boucle est dès lors bouclée.
Dans le domaine économique aussi, deux alternatives (il n'y en a pas d'autres !) devaient s'imposer: le libéralisme ou le socialisme.
La propriété terrienne, commerciale ou industrielle étant vacante du fait du départ brutal des colons, commerçants et industriels français, il fallait la consacrer "bien du peuple" ou l'affecter à de nouveaux propriétaires.
La Révolution s'étant laissée prendre à son altruisme a préféré ne pas considérer cette propriété comme un butin de guerre et la répartir entre les combattants. Elle l'a confiée aux "comités de gestion". Le choix du socialisme s'est ainsi imposé de lui-même.
Le 22/10/62, Ben Bella, Ahmed Francis, Ahmed Medeghri, Amar Ouzeggane et Bachir Boumaaza décrètent l'institution des comités de gestion dans les entreprises agricoles vacantes.
Le 23/11/62 Ben Bella, Ahmed Francis, Laroussi Khelifa et Boumaaza instituent les comités de gestion dans les entreprises industrielles, artisanales et minières vacantes.
Le 10/7/63: Medeghri, Boumaaza, Bouteflika, Benhamida et Belaouane sous l'autorité de Ben Bella créent le CNAP - centre national d'amitié avec les peuples et lui nomment Yacef Saadi président. Son but: "faire connaitre sur le plan international les efforts et les réalisations de la RADP pour l'édification d'un socialisme spécifiquement algérien."
Le 5/4/63 ben Bella nomme Mohamed Harbi conseiller chargé du secteur socialiste.
Les détracteurs du Parti Unique et du Socialisme trouveront ci-haut une modeste explication qui leur démontrera que le Pays n'avait pas l'embarras du choix...
Mais le Parti Unique était traversé par tous les courants d'opinion qui s'étaient fondus en lui malgré eux.
Durant la période 62-65, Nasser qui avait une dette envers Boulganine et une dent contre les islamistes s'est infiltré dans la conscience encore en formation de Ben Bella grâce à Fethi Dhib et a convaincu le jeune pouvoir algérien de s'arrimer à l'URSS. Boudiaf rapporte dans son "Ou va l'Algérie" que Ben Bella, dans une interview à l'Unita, disait qu'il voulait instaurer un socialisme à la cubaine...
C'est en cette période que Hachemi Cherif était sous-préfet à Palestro et son camarade, Abderrahmane Chergou à Miliana (un homme d'une grande probité, d'un grand courage et d'un amour fou pour le pays et qui fut assassiné par les islamistes dans une cité populeuse où il a continué à habiter malgré ses prises de position sans complaisance et les menaces patentes qui pesaient sur lui).
A l'époque, le représentant des berbéristes, trop impatient, fut poussé à l'insurrection (je sais que cette classification va faire grincer des dents...) et le représentant des islamistes fut interdit d'exercice en dépit de l'aura de son père...
Puis vint le 19 juin 1965. Le Parti Unique dut se recomposer. Les communistes furent impitoyablement pourchassés, les berbéristes exilés et toute idée de contestation sévèrement réprimée.
Le 22/10/66 débuta une réunion du conseil de la révolution qui se termina le 26 par une résolution au sujet de la "fuite" de Mahsas et Boumaaza (qui n'étaient ni communistes ni berbéristes, c'est vous dire dans quel maccarthysme s'était enlisé le pays !): leur adhésion au mouvement du 19 juin n'a procédé que de bas calculs et d'une ambition morbide du pouvoir. Leur fuite à l'étranger conséquemment au remaniement ministériel les concernant ne fait que confirmer leur conception opportuniste de la responsabilité. Leur collusion avec les contre révolutionnaires à la solde de l'étranger est un acte de haute trahison..." peut-on y lire.
Mais ce n'est malheureusement pas à l'aide de seules résolutions que furent réduits les opposants...
Les arabo-islamistes se retrouvèrent propulsés aux commandes aux côtés des "nationalistes".
Usant d'un entrisme pernicieux et profitant des préjugés favorable de Boumediene surtout suite aux développements que connut la scène moyen-orientale et qui développa l'idée du panarabisme, ils ont pu prospérer au détriment des forces de gauche qui se sont vues réprimées et c'est ainsi que Boumediene nomma le 12/9/66 Malek Bennabi conseiller technique au ministère de l'éducation, un ministère qui fut confié à Taleb El Ibrahimi (qui représentait et représente encore le courant islamiste soft) dont Mehri viendra assurer le secrétariat général du 12/11/70 au 31/10/77 entre temps, Lacheraf qui représente le courant moderniste fut relevé le 9/10/74 de ses fonctions de conseiller à la présidence du conseil pour les affaires éducatives et culturelles et du centre national d'études historiques et envoyé faire l'ambassadeur en... Argentine !
Taleb réussit à instiller graduellement une empreinte ulémiste à l'histoire après avoir corrigé son nom en ajoutant El Ibrahimi à Ahmed Taleb le 20/7/70.
Mais tout n'était pas si simple. Parallèlement à la poussée islamiste, les gauchistes qui ont aussi découvert les vertus de l'entrisme en inventant "le soutien critique" commencèrent à grignoter des pans de pouvoir. Un échange de bons procédés eut lieu entre Boumediene et le PAGS par étudiants volontaires interposés.
Malgré l'autoritarisme du pouvoir, il y eut quand même des frictions parfois dramatiques. Mais ces frictions n'étaient pas pour déranger ce pouvoir qui les exploita tantôt en encourageant une tendance tantôt l'autre. Et c'est ainsi que se succédèrent les conférences islamiques alors qu'on arrimait solidement le pays à l'union soviétique grâce à une coopération tous azimuts...
Ce fut l'époque où Abassi Madani se faisait élire à l'APW d'Alger et où il trônait dans la commission d'arabisation de l'Université quand Kateb Yacine donnait en représentation "Mohamed Prends ta valise" ou "l'homme aux sandales de caoutchouc".
si les forces progressistes axaient leur travail sur les aspects économiques, et la prise en charge du quotidien, les forces traditionalistes faisaient un travail autrement plus porteur à terme puisqu'elles s'attelaient à moduler les esprits et c'est Taleb El Ibrahimi qui fit de sorte que l'on célébrât le 16 avril "jour du savoir" en hommage à Ben Badis qui éclipsa Ben M'Hidi, Benboulaid et Didouche des manuels d'histoire et qui fut considéré comme le père spirituel de la Révolution, bien plus que l'Emir Khaled oublié ou Messali Hadj occulté ou Boudiaf exilé.
C'est surement sous son influence que Boumediene décréta la fin du "weekend infidèle" pour le remplacer par un "weekend islamique" le 11/8/76 après qu'il eut interdit par ordonnance ... l'élevage du porc le 27/2/75 !
Mais si les traditionnalistes arabo-islamistes se distinguaient par leur persévérance et leur foi en leur cause, les options socialisantes étaient minées à la base parce que ceux qui les théorisaient n'en étaient même pas convaincus et c'est ainsi qu'on retrouve au hasard des commissions des hommes qui ont démontré par la suite leur totale aversion de cette option.
Jugez-en:
10/11/72 désignation des membres de la commission nationale pour la Gestion Socialiste des Entreprises; on y rencontre Smail Hamdani, Driss Jazairi et... Abdelhamid Brahimi !...
30/1/74: commission nationale du Statut Général du travailleur (SGT): Belloucif et... Hidouci !
Et malgré les balises posées dans la Constitution de 1976: Promulguée le 22/11/76, elle contient 5 fois le mot irréversible et son article 195 est d'une rigueur extrême puisqu'il dit en toutes lettres: "aucun projet de révision constitutionnelle ne peut porter atteinte à l'option socialiste" ; malgré l'inamovibilité du FLN et sa surdité aux airs du temps ( les Statuts du Parti, adoptés lors du Congrès du 27/1/79 contiennent 11 fois le mot socialisme…), le socialisme, condamné par l'histoire, par ses propres servants mais aussi par tous ceux qui ne pouvaient y trouver le terrain favorable à la fructification des fortunes acquises en le parasitant, ce socialisme pourtant si bien protégé par les textes allait s'avérer d'une incroyable fragilité.
A la mort de Boumediene, un pouvoir faible lui succéda. Messaadia, en gardien du temple arabo-musulman, fit du parti un appareil aux mains des forces arabistes et islamistes et en expulsa graduellement les autres composantes.
La surenchère islamiste s'instaura avec plus de vigueur et le 14/3/81 on décréta l'inénarrable "arabisation de l'environnement"; le 6/3/84, le ministre des habous lance un appel d'offre pour l'impression de 50 000 exemplaires des écrits de Ben Badis et pour finir en apothéose, le 9/6/84 fut promulgué l'infâme code de la famille...
Entre temps, en 1985 s'effectua une jonction qui n'a pas fini de dévoiler ses secrets: celle des oppositionnistes revanchards: Ait Ahmed dont la bataille se résumait à un communiqué par semestre pour ne pas se faire oublier et Ben Bella qui, pensant sans doute que seuls les imbéciles ne changent pas, avait troqué le bleu Shanghai et le col Mao du prolétaire pour la barbe et la abaya de l’islamiste.
Lassés par les avatars arabistes du pouvoir et la nonchalance presque complice d'Ait Ahmed en qui ils voyaient pourtant leur père spirituel, les berbéristes eurent un sursaut d'orgueil en 1980 et s'installèrent dans une « subversion » d'usure qui resurgissait par intermittence sous différentes formes: culture, droits de l'homme... En même temps, galvanisés par le khomeynisme et poussant leur surenchère à l'extrême, les islamistes crurent le pouvoir à portée de fusil et déclenchèrent l'épisode Bouiali.
Aux abois, le pouvoir bousculé de chaque côté, abandonna la partie. Livré à des courants aussi irréductibles qu'impatients, le pays courait vers une véritable partition sanglante.
Le holà fut mis par l'armée et les gens de bonne volonté qui reprirent les choses en mains... La suite, on la connait.
C'est ce pouvoir incolore et inodore mais le seul à pouvoir conserver le pays à l'abri des appétits des uns et des autres qu'aujourd'hui on veut casser sans savoir (ou en sachant pertinemment) que face à l'irréductibilité des prétendants, il est aléatoire d'espérer arriver à une cohabitation sans cette zone tampon qu'il représente.
Bouteflika qui a le mérite (!) d'avoir été éjecté sans ménagements du pouvoir et de s'être tenu à l'écart du système durant deux décennies a un autre mérite, celui non négligeable d'avoir réussi à faire cohabiter arabistes, berbéristes, islamistes, évolutionnistes, démocratistes... faisant s’asseoir à la même table Khalida Messaoudi et Aboujerra Soltani et réunissant dans le même comité de soutien Nationalistes, Islamistes et… Trotskistes !
Et si on devait tolérer dans la révision globale du schéma politique qui s’annonce, l’abandon des garde-fous instaurés après les dérives des années 90 et re-tolérer les chapelles identitaires au détriment de partis politiques aux programmes moins exclusifs, il faut espérer que le Pays puisse toujours avoir en réserve des hommes qui ont su garder leur équidistance face à ces groupes irréductibles afin d’en faire ses fondés de pouvoir.
Parce que s'il devait puiser de ces paniers à crabes, il condamnerait le peuple à des épreuves encore plus douloureuses que celles qu'il a vécues.
D, 25 Avril 2011

EL MOURADIA N'EST PAS SAMIRA TV

  CONSECRATIONS SANS MERITES... Je n'ai pas l'honneur de connaître tous les sénateurs, heureux élus du tiers présidentiels, ni les a...