BOUCS A CLOCHETTES ET MOUTONS DE PANURGE...
A lire les accusations, plaidoiries, réquisitoires et condamnations des tenants des causes arabiste, islamiste, kabyliste et patriotardique (à ne pas confondre avec patriotique), on ne peut s'empêcher de rire...
...de peur d'en pleurer, bien sûr !...
Tous ceux qui, en vérité, font commerce de ces causes ne font rien pour les promouvoir car ils n y trouvent aucun intérêt et ils n’ont ni les compétences, ni le temps, ni la volonté pour le faire… Ils n'hésitent pas à s’en faire plutôt soldats zélés pour s’en aller en guerre à la Don Quichotte contre leurs pseudos ennemis, c'est-à-dire les défenseurs des autres causes…,
Et leur programme se résume à un seul point : mettre en garde leurs troupes, les mobiliser et les galvaniser contre la menace à laquelle leur cause ferait face, l'adversité qui lui serait témoignée et les complots qu'elle subirait...
Ce programme a le mérite, en focalisant sur les périls, de faire oublier tout débat sur la légitimité ou l’opportunité de ces causes et de leur simple existence, et sur l’indigence pour ne pas dire l’absence de toute stratégie de leur promotion, ce qui les fige sur la seule idée qu’elles sont légitimes tout simplement parce qu’elles existent alors qu’elles n’existent que parce qu’elles se victimisent en soutenant qu’elles sont déniées ou combattues…
Et tous les « guides » de ces causes réussissent ainsi à se créer des auras de « lider maximo » sans coup férir, ni poches solliciter, ni sueur exsuder, ni effort consentir, ni risque courir, se suffisant juste de fustiger et vilipender le vilain ennemi qui ne risque même pas d’être rencontré sur champs de bataille, ni même en joutes verbales car chaque pseudo-cause et ses servants évolue dans sa propre sphère…
Il est vrai qu'il est plus facile de parer des coups fictifs que de poser de vrais jalons; et crier au loup mobilise bien mieux les porteurs de fourches que les porteurs de pelles…
Et il est vrai qu’une société sans projet finit par compter plus de lanceurs d'alertes que de lanceurs de ponts…
C’est ce qui fait que l’arabisme étroit se renforce par le renforcement du kabylisme encore plus étroit, que le nationalisme du slogan tire sa puissance de la puissance de l’islamisme de l'apparence, au nom de la loi qui veut qu’un chauvinisme exacerbe un autre chauvinisme et que chaque chauvinisme se renforce par la force de l’autre chauvinisme auquel il s’oppose…
Et c'est pourquoi il nous est donné à chaque carrefour de notre bellicisme et de nos irréductibilités que nous inculquent nos chevaucheurs de causes, pour les vilains besoins de leurs causes, de trouver :
- l'imam qui, du haut de son minbar met en garde ses brebis contre ceux qui en veulent à leur foi, au lieu de leur expliquer que leur foi leur commande de tolérer ceux qui n’y croient pas…
- le gourou qui, derrière les porte-voix appelle à combattre les ennemis du particularisme ethnolinguistique au lieu d’inciter ses auditoires à s’accommoder des autres particularismes,
- le carriériste du patriotisme qui, drapeau au vent crie au viol de la révolution par le peuple en oubliant le slogan qui fait pourtant la belle part à ce peuple,
- le puriste de la langue qui déroule son emphase pour appeler à sa sacralisation oubliant que ce qu’on attend d’elle c’est essentiellement l’accomplissement de sa mission véhiculaire…
Et tous ces personnages qui sont devenus personnalités et qui se sont conférés des statuts et se sont construits des statues en épousant la cause pour en jouir comme d'une chasse gardée ne servent en vérité nulle autre cause que celle de ce pouvoir incolore qui fait semblant de chercher les équilibres alors qu'il manœuvre pour exacerber les tensions et les divergences qui lui ont permis, en divisant pour régner, de s’assurer légitimité, incontournabilité, récurrence et longévité...
Il est temps que les masses panurgisées relativisent les causes chauvinisées et signifient leurs fins de missions aux boucs à clochettes qui les guident vers des confrontations imbéciles qui ne servent en fin de compte que la pérennité de ces boucs et ne favorisent que le statu quo politique sans perspectives, stérile et ankylosant, et le système qui l’entretient…
D’aucuns vont terminer la lecture de mon texte en se disant : « mais wach gal ? »…
Je serais tenté de leur répondre: «ma goult walou !»
15/1/2017
