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vendredi 6 janvier 2017

DU CRUCIVERBISME AU VERBICRUCISME

 

Les premières grilles de mots croisés que j'ai noircies sont celles d'Alger Républicain puis El Moudjahid... c'était en 1966... J’avais 14 ans... et je me souviens que c'est avec mon ami Essaid Taib que je m'évertuais à trouver le mot en 6 ou 7 lettres qui répondait à la définition proposée à l'époque, si mes souvenirs sont bons, par un monsieur du nom de Hammoutène...
Puis je fis mienne la passion cruciverbiste dans les années 70 durant lesquelles le parti unique nous ramenait de France, pour nous occuper, des revues de mots croisés... Ca s'appelait "Sport Cérébral" et j'avais atteint le niveau des 4 étoiles...
C'était des grilles très indigentes et dans lesquelles on rencontrait très peu de finesse dans les définitions et beaucoup de noms propres de villes, villages, rivières et personnalités de France et de Navarre et les petits mots étaient définis de même sempiternelle manière: Asa, Sig, Ela, Eve, Tyr, Soc, Noe, Rot, Pet, Pis, Lut, Nis... étaient aussi facile à placer que les marques du féminin, de l'indicatif, du pluriel et les terminaisons des verbes conjugués...
A l'époque je commençais déjà à me fatiguer de ce jeu et j'eus l'idée de devenir producteur plutôt que consommateur...
Mon ami Djebri Moussa qui travaillait dans une administration me ramena une liasse de feuilles A4 polycopiées au stencil dont je lui avais remis une épreuve et je m'échinais sous les oliviers à les noircir en essayant de limiter le nombre de cases noires et à éviter de les avoir adjacentes tout en faisant en sorte que mes définitions soient les plus astucieuses possible...
J'ai conçu alors une dizaine de cahiers d'une vingtaine de pages comprenant des grilles naines et des grilles géantes, des "chassés-croisés" et des grilles muettes, des grilles portraits et des grilles à textes, bref, toute la panoplie des jeux de lettres...
J'écrivis alors, sans grande conviction, une lettre au ministère de l'information et de la culture, sollicitant l'autorisation de publier une revue de mots croisés en expliquant que le pays aurait tout à gagner car ça lui éviterait d'acheter des grilles de moindre facture à factures plus salées et dans lesquelles ne manquaient pas des messages idéologiques ou théologiques, en donnant l'exemple de ASA qui y était défini comme roi d'Israël au lieu de "unité sensible"...
La réponse du ministère me parvint peu de temps après... Elle était signée d'un certain Rahal et elle me signifia que "les journaux et revues périodiques étaient de la seule initiative du Parti et qu'il m'appartenait de me rapprocher de leurs rédactions pour leur soumettre ma collaboration"... Cette réponse mit fin à mes ambitions en la matière mais pas à ma passion...
Je repris goût aux mots croisés en découvrant la grille du journal "le Monde" que nous recevions alors dans toutes nos librairies...
J'aimais très bien les définitions de Guy Brouty qui y sévissait dans une grille de 10x10 où il donnait des définitions si fines qu'on devait suer pour les trouver mais si évidentes qu'après les avoir trouvées on se disait: "Mais comment n'y avais pas pensé plus tôt ?"... Je me souviens particulièrement de l'une de ces définitions d'un mot en 8 lettres: "permet d'ouvrir le feu"... que je n'ai pu trouver qu'après des heures de cogitations: "autopsie"...
Il y'avait aussi deux monstres du cruciverbisme: Roger La Ferté et Max Favalelli... Si je pouvais résoudre quelques grilles du premier, pour le second je ne pouvais même pas placer les signes du pluriel et tous les numéros de l'Express de Françoise Giroud et JJSS que je possédais avaient la même caractéristique à la page "mots croisés": celle de la face ironique de Max Favalelli rageusement raturée pour mon impuissance à résoudre ses grilles...
Je fus par la suite accepté au Chroniqueur de mon défunt ami Lakhdar Ezzine qui m'édita une revue nommé RAHA en 12000 exemplaires dont je pus en trouver 3 dans une librairie de Boumerdes et dont je n'ai conservé qu'un exemplaire que je ne pourrais retrouver qu'après ardues recherches dans le fatras de mes écrits...
Je pris en charge comme de bien entendu la page "jeux" du Chroniqueur et cela me donna l'occasion de partager ma passion jusqu'à la mise à mort du journal suite aux événements tragiques qui furent imposés gratuitement à notre pays...
Je rejoignis ensuite l'équipe El Manchar où mon ami Mahfoud Aider me permit de sévir dans la page "jeux" que je concevais avec grand plaisir car j'avais trouvé mes comptes (pas en dinars mais en liberté d'expression) dans ce journal où je pouvais laisser libre cours à ma fantaisie...
El Manchar finit lui aussi par mourir de mort peu glorieuse, victime des ambitions mal placées des gens ou des vilains calculs politiciens et je me retrouvais sans tribune...
J'eus alors l'idée de créer une formule assez astucieuse: celle d'une feuille en format tabloïd, pliable jusqu'au quart et qui serait noircie sur ses deux faces de jeux d'esprit... j'en conçus un prototype en 1994... Ce fut laborieux car je dus utiliser un logiciel de traitement de texte qui n'avait pas les fonctionnalités actuelles de Windows... Ce logiciel s'appelait GEOWORKS et il était difficile à manipuler mais je réussis mon challenge et je pus tirer mon épreuve que je remis à mon ami Amar Yaker de l'imprimerie Aurassi qui m'imprima 400 exemplaires...
Ce n'était pas un travail vraiment réussi car le papier était mal choisi, il était sans couleurs et au pliage, ce n'était pas très beau à voir...
J'ai fait alors; aux premiers mois de l'année 1995; sur ma quatrelle le tour des librairies de la région et y déposai des liasses de 10 à 20 exemplaires... Pris par des préoccupations de sécurité et de survie, j’ai abandonné cette expérience en ne revenant même pas chez les libraires pour m'enquérir de l'accueil qu'avait reçu mon travail...

Il m'est resté quelques feuillets de cette oeuvre et quand on introduisit la démocratie dans notre pays et que je vis l'effroyable gâchis en posters couleurs de candidats à la présidence, aux législatives, aux APW et APC, je vous avoue que j'ai ressenti une grosse frustration en me disant qu'avec le budget gaspillé pour un seul candidat à la mairie, j'aurais pu entretenir cette revue durant une année...et pas sur du papier buvard en noir et blanc mais sur papier lustré et en couleurs s’il vous plait !
6/1/2017

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