Monsieur Bachir Derais a publié une vidéo d’un passage trop
bien choisi d’une intervention de M. Harbi et s’est laissé aller à un
commentaire dans lequel il n’épargne pas la probité de Ben Bella et Boumediene,
les accusant très explicitement d’avoir accordé en catimini à la France le
droit de perpétuer sa domination sur des portions du territoire algérien… Je
n'ai pas l’habitude d’écouter les « témoins-acteurs » de la guerre de
libération et des événements qu’a connus le pays depuis 1962 car je ne peux concevoir
qu’un acteur soit un témoin fiable et M. Harbi fut un acteur trop engagé dans
l’histoire post indépendance pour que ses versions ne soient pas entachées de
subjectivisme pour ne pas dire de partialité... je n'aurais pas dû le faire car
après l'avoir écouté, j'ai perdu toute l'estime que j'avais pour cet homme et
tout le respect que m'inspirait son passé même si j’étais déjà assez réservé
sur sa personne au vu des postes qu’il eut à occuper, de la controverse générée
par certaines de ses prises de position
et de la terre d’exil qu’il s’est choisie…
M. Harbi dit en résumé que
1- ce furent Ben Bella et Boumediene qui discutèrent des
"accords militaires" avec l'ambassadeur de France,
2- ces discussions étaient secrètes,
3- De larges facilités avaient été accordées à l'armée
française
4- Un officier algérien dont se plaignit l'ambassadeur pour
avoir "gêné" l'armée française fut relevé de ses fonctions...
Quand on écoute cet ensemble d'inepties (c'est le mot) sans
situer les faits dans le contexte des Accords d'Evian, on se prend à croire que
le tandem, Ben Bella et Boumediene a
fait acte de "collaboration" et serait coupable de "haute
trahison"… et on comprend que c'est
à cette conclusion que M. Harbi voulait arriver, en usant d’un sourire faux,
hautain et perfide (j'ai pesé mes mots)...
Je ne suis pas historien comme Monsieur Harbi mais j’ai le
mérite de regarder l’histoire d’un œil impartial car je n’ai pas été un de ses
acteurs (controversé)…
Voici ma lecture des faits…
1- a) Ben
Bella, Boumediene et Chabou n’ont pas, comme on semble vouloir l’accréditer,
usurpé la fonction de négociateurs… ils étaient les représentants attitrés du
pouvoir algérien et si la France a accepté de les avoir comme interlocuteurs
c’est en vertu de ce statut et non parce qu’ils auraient été plus « conciliants
» pour ne pas dire plus, comme on le sous-entend.
b) Les
représentants du pouvoir algérien n’ont pas négocié des nouveaux « accords militaires » avec les
forces armées françaises… Ces Accords existaient et faisaient partie des
Accords d’Evian négociés entre le GPRA et les représentants de De Gaulle ; et les clauses militaires avaient été
approuvés par Krim Belkacem et figurent en noir sur blanc dans le document que
tout le monde peut consulter, très précisément au titre III que je reprends
dans ce qui suit:
"III. DU RÈGLEMENT DES QUESTIONS MILITAIRES
(...)
-
L'Algérie concède à bail à la France l'utilisation de la base de Mers El-Kébir
pour une période de quinze ans, renouvelable par accord entre les deux pays ;
-
L'Algérie concède également à la France l'utilisation de certains aérodromes,
terrains, sites et installations militaires qui lui sont nécessaires."
c)- Ces Accords ont été rejetés par l’EMG mais leur
signature et leur dépôt à l’ONU leur ont donné « force de loi »
internationale et ils ne pouvaient être dénoncés sans risques de
voir la France refuser elle aussi d’exécuter d’autres clauses favorables à
l’Algérie…
d)- La discussion entre les représentants du nouvel état
algérien et ceux de la France ne portaient pas sur le « principe » de l’octroi
des facilités à l’armée française mais sur les modalités de mise en oeuvre de ces facilités (durées et
dates de renouvellement des baux,
liberté d’accès aux sites sensibles, déplacements des éléments chargés de faire fonctionner ces
sites, périmètres de sécurité, facilitations, peut être aussi montant des baux
et modalités de paiement etc…).
2- M. Harbi
affirme que les discussions sur ces accords
se sont tenues « dans le plus grand secret »… j’ai parlé d’ineptie et je
pense que celle là en est le meilleur exemple…
Je ne sais pas ce que l’ « historien » entend par « secret »
et comment il peut penser qu’on puisse négocier d’accords militaires sans les
entourer du strict secret… militaire !...
Il aurait peut être fallu inviter une délégation russe et
une délégation américaine et terminer les discussions par un communiqué commun
et une conférence de presse durant laquelle les deux délégations auraient
répondu à toutes les questions des journalistes portant sur les coordonnées des
sites militaires, ce que l’armée
française allait y bricoler, les effectifs qu’elle allait mobiliser,
l’emplacement des postes de garde, les noms et grades des personnes qui y
seraient mobilisées, les armes qu’elles posséderaient etc…
Je sais des demandes en mariage que les familles effectuent
en grande discrétion et là, on s’étonne que des questions militaires de
sensibilité absolue se soient déroulées dans un grand secret !...
3- Les
Accords d’Evian ayant retenu le principe de la présence française sur «
certains aérodromes, terrains, sites et
installations militaires », les négociations ne pouvaient porter que sur les «
facilités » et non les « difficultés » d’occupation de ces sites… mais «
facilités » revêt ici le terme technique de « balisage » et de modalités et non
de permissivité comme veut le sous-entendre Monsieur Harbi… Les français sont
venus négocier avec les Algériens les conditions de mise en oeuvre de l’accord
conclu à Evian afin que les forces françaises puissent, non pas planter des
choux sur les espaces concédés mais leur faire jouer le rôle militaire qui
avait poussé l’armée française à négocier avec M. Krim et à lui arracher son
accord pour y conserver une présence
momentanée… En acceptant le « principe » de cette présence, on ne peut ne pas
accepter l’octroi des « facilités » à concéder pour que cette présence soit
assurée…
4- Le point 4 découle de la logique du point 3… Si l’Algérie a accepté le principe de l’occupation de ces sites, elle doit accorder les facilités nécessaires à la présence des troupes qui doivent les occuper, à leurs déplacements, à l’exploitation de ces sites aux fins pour lesquelles la France a négocié et obtenu l’accord de Krim et certainement pas pour s’en servir comme courts de hockey ou d’élevage de chevaux camarguais ou bretons… L’officier dont l’ambassadeur se serait plaint au Président a sans doute outrepassé les ordres qui lui étaient donnés en matière de « facilitations » c'est-à dire aux droits des forces françaises consacrés par les Accords d’Evian… L’intervention de l’ambassadeur ne relève que de ses devoirs et le changement d’affectation de cet officier est une mesure qui démontre que l’Etat Algérien était structuré et que son armée fonctionnait déjà dans le respect de la discipline et non comme une milice ou les pouvoirs des chefs n’étaient limités que par leur propre volonté…
Présenter ce fait anodin de rappel à l’ordre d’un officier coupable d’abus de pouvoir et de non respect des ordres de la manière dont le présente M. Harbi relève d’une méconnaissance de la discipline militaire ou pire, d’une volonté de démontrer à tout prix une connivence ou une subordination du pouvoir de l’Algérie naissante à la France qu’elle venait de bouter hors de ses terres…
Les ennemis de ces deux présidents et leurs alliés ne sont que les berberistes séparatistes qui s acharnent sur eux pour l unique raison qu ils étaient intransigeants envers l unicité de la langue en Algerie et l indivisibilite et l unités de son territoire .Autre chose n est que diversion et camouflage.
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