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dimanche 24 janvier 2021

FRENESIE EXEGETIQUE

 Nous sommes le 25 janvier...



L'anticyclone des Açores semble avoir repris sa place pour mieux corser notre angoisse face à ce que le temps nous réserve... j'ai dit un jour que c'est "quand l'homme vit l'enfer qu'il devient réceptif à l'idée du paradis"... Devant les incertitudes de notre avenir, nous devons nous attendre à une recrudescence de notre spiritualité de conjoncture car les faux dévots et les sorciers en tous genres profitent des angoisses existentielles pour offrir l'espoir des félicités virtuelles...
Dans cet ordre d'idée, si vous le voulez bien, je vous donne à lire ce texte que j'ai commis le 28 mars 2013...
« Et ils dirent : « Seigneur, nous avons obéi à nos chefs et à nos grands. C'est donc eux qui nous ont égarés du Sentier. Ô notre Seigneur, inflige-leur deux fois le châtiment et maudis les d'une grande malédiction » (Sourate 33 - versets 67-68)
« Malheur à vous, docteurs de la loi et pharisiens hypocrites, qui êtes semblables à des sépulcres blanchis, qui au dehors paraissent beaux, mais qui au dedans sont pleins d’ossements de morts et de toute sorte de pourriture (Matthieu 27).
Sidna Aissa n’a eu que mansuétude, compassion et amour pour les humbles les rassurant sur la miséricorde divine ; par contre, il n’a pas arrêté de fustiger et de menacer des pires tourments les pharisiens, tenants du rigorisme religieux qui avaient fondé un parti politique basé sur la religion et qui n’arrêtaient pas de diffuser et d’imposer des prescriptions aux croyants ; corsant à l’extrême la pratique religieuse et éloignant la foi de son essence pour en faire un puzzle compliqué dans lequel les artifices corporels, vestimentaires et rituels était conçus comme vecteurs essentiels de la spiritualité…
On sait comment l’intégrisme incarné par ces pharisiens réagit alors face à ce révolutionnaire qui s’était résolument opposé à l’hypocrisie et au culte des apparats…
Plus loin, Sidna Brahim dut subir le feu des tenants du rigorisme qui voyaient en ses attaques contre leur fonds de commerce religieux une menace pour leur statut de directeurs des consciences de la cohorte humaine dont ils exploitaient la naïveté et profitaient de la peur, qu’ils entretenaient par la menace des tourments de l’enfer, en cas de non inféodation à leurs thèses… Des tourments qu’ils avaient incrustés dans les subconscients par l’effet d’un matraquage en règle…
Et plus près, c’est Sidna Mohamed qui dut lutter devant la coalition tripartite des idolâtres et des prêtres et rabbins qui, chacun à sa façon, façonnaient les consciences, à coups de décrets visant à les faire prisonniers de dogmes qu’ils ne corsaient que pour mieux s’imposer en passages obligés pour les expliciter, se faisant ainsi représentants inévitables de Dieu sur terre.
C’est dire que là où il y’a théologie il y’a obligatoirement formation d’un « clergé » qui la moule selon ses intérêts pour en faire son idéologie, n’hésitant pas à s’imposer au pouvoir politique et à lui faire adopter ses décrets dans une alliance de tous bénéfices pour les deux parties…
Quant cette jonction du spirituel dénaturé et du temporel qui lui est complice se réalise, le peuple est condamné à boire le calice jusqu’à la lie !...
Sachant que tout statisme lui est fatal ; le pouvoir combiné qui atteint très vite ses limites en matière de gouvernance et de satisfaction des exigences temporelles de la foule, ne trouve d’autres alternatives que de rentrer dans la surenchère spirituelle pour la noyer de rhétorique et, faute de pouvoir assurer l’ordre, la justice et le pain, il promet à cette foule la félicité de l’au-delà car impuissant à la faire sortir de l’enfer d’ici-bas.
Il fait alors feu de tous bois en réexpliquant les préceptes, ajoutant à chaque fois les notes les plus saugrenues et parfois les plus choquantes, inventant de nouvelles règles, justifiant l’injustifiable et cherchant une logique spirituelle à toute incongruité en ayant pour seul fil directeur la volonté de réduire les libertés humaines en cadrant les convictions et en réglementant les pratiques dans une seule direction : celle qui fera de l’homme la brebis docile prête à substituer à son Créateur, le directeur de conscience qui s’en est proclamé représentant…
Quand il lui arrive de s’organiser et de se hiérarchiser, ce clergé arrive à se doter d’une autorité spirituelle (Pape, grand Rabbin, Ayatollah ; Mufti…); ce n’est pas pour autant qu’il perd de sa capacité de nuisance, mais il a au moins le mérite de circonscrire cette nuisance au canal dans lequel elle opère et dont l’écluse ne s’ouvre et se ferme que par le chef spirituel consacré auquel sont confiées les clés du pouvoir absolu…
L’alternative de démocratiser la foi n’est pas pour autant moins néfaste ! Quand ce clergé est livré à n’importe quel « savant de la foi » on se retrouve en effet dans une tragique cacophonie …
C’est précisément la situation que vit l’Islam Sunnite qui, s’il a un Dieu, un Prophète et des doctrines plus ou moins proches, ne dispose point d’un porte-parole ou d’une autorité morale consacrée, capable de filtrer, contrôler, censurer les exégèses; ce qui lui vaut de se faire interpréter par une foultitude de nouveaux prophètes qui tirent leur notoriété et souvent aussi leurs richesses de leur fatwas…
Des fatwas à en veux-tu en-voilà, des fatwas à volonté et dont l’excentricité fait l’intérêt ; des fatwas qui disent la chose et son contraire, qui justifient ce qui, hier était tabou, qui autorisent ce qui était séculairement proscrit ou proscrivent ce qui était séculairement permis.
Des fatwas salaces parce que leurs auteurs savent que la salacité en ces terres de l’interdit sont payantes, des fatwas misogynes parce que leurs auteurs savent toutes les frustrations que cultivent leurs auditoires, des fatwas qui font la part belle aux violences car leurs auteurs connaissent tout le potentiel de férocité caché par les peuples auxquels elles sont destinées parce que trop longtemps asservis et brimés…

Mais cette frénésie exégétique et ce foisonnement d’imams cathodiques s’explique aussi, comme tout commerce, par le principe consacré de l’offre et de la demande... Très souvent, pour ne pas dire toujours, c’est le peuple qui oriente le prêcheur en eau trouble vers la fatwa qui assouvit son désir, son intérêt, ses pulsions, ses besoins, ses ressentiments… l’Imam de circonstance ne joue alors que le rôle d’alibi religieux ; et quand il refuse, par honnêteté, comme le valeureux Cheikh El Bouti, de s’inscrire dans la logique qu’on veut lui imposer et qui se situe souvent aux antipodes de l’esprit de la foi qu’il professe, il se fait crucifier par les rhéteurs, sous les applaudissements des zélotes…
C’est cette propension à adapter l’homme à la bassesse de son instinct et non à l’élever à la hauteur de son esprit qui a permis un jour, en ces terres, à d’arrogants, tonitruants et haineux Savonarole de s’imposer au détriment du monument de modestie, de sagesse et de raison que fut Abderrahmane El Djilali...
25/1/2016

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