DE FIL EN AIGUILLE

 Nous sommes le 1er février et il sera 8 h dans 20 minutes...

Je suis au boulot depuis 3 quarts d'heure... Il ne pleut pas et le jour s'est levé. Un vent froid souffle sur la contrée.

En rentrant au bureau, j'ai ouvert mon tiroir et la première chose qui m'a sauté aux yeux, c'est cette bobine de fil noir et cette aiguille à coudre....

Wakha Sidi Zoheir, ce n'est pas du tout ce à quoi te fait penser ton cerveau dérangé...

Ana makache elli tendebb 3liya pour m'ensorceler parce que mon avenir est loin derrière moi et de mes atours de jeunesse il ne me reste que de vagues souvenirs pour entretenir mon ego...

De plus je n'ai ni grosse fortune, ni statut enviable, ni probabilité d'hériter d'une richissime tante oubliée, ni cartes de visite de Ould Abbas ou Ouyahia, Rawrawa ou Ali Haddad... alors, une bonne dame qui me mettrait de ces grigris pour m'agripper c'est aussi improbable que le rappel de Belkhadem par le Président de la République où la conversion de la Grande Mosquée en siège de la FAF...

Non ya Akhina Zoheir, cette bobine et cette aiguille de fil à coudre, cela remonte à une tradition léguée par mon défunt père qui l'a héritée de son père qui l'a, lui aussi reçue de son grand-père, jusqu'aux racines de la généalogie ou... à l'invention du fil à coudre!

Nos parents se faisaient fort en effet d'avoir toujours dans la musette, qu'ils aillent au boulot, au marché ou à la fête, le couteau pour saigner le mouton ou la poule blessée afin d'atténuer ses souffrances et de rendre licite sa chair, et le nécessaire à coudre pour rapiécer un pantalon qui se déchirerait au mauvais endroit...

Et moi, fidèle à cette pudeur ancestrale, je ne peux déroger à cette précaution...

Moi je ne suis pas de ta génération qui se déchire le pantalon aux genoux et bientôt sur les fesses pour démontrer qu'elle est de son temps...

Nous, nous n’irons pas tenter le sort en appelant la misère, parce que la misère, nous l'avons bien connue en chair et en os... je veux dire en os et pas en chair...

1/2/2017